Les 9 et 16 décembre 2020 se sont déroulés deux webinaires organisés par la Fondation Daniel et Nina Carasso et la Chaire Unesco Alimentations du monde sur les enjeux actuels de la lutte contre la précarité alimentaire et de l’égalité d’accès à une alimentation durable.
Dans ce document, vous pourrez retrouver l’ensemble des interventions vidéos de ce webinaire sur les sujets suivants :
Session #1 : Solidarités alimentaires, de quoi parle-t-on ?
- Précarité alimentaire et droit à l’alimentation durable en démocratie
- L’émergence de dispositifs de solidarité alimentaire systémiques et coopératifs
- Des politiques nationales en mouvement
Session #2 : Amplifier, accroître, enraciner… comment changer d’échelle ?
- Que veut dire “changer d’échelle” ?
- Expériences de changement d’échelle
- Comment accompagner et outiller les projets ?
Mieux comprendre les problématiques actuelles d’accès à l’alimentation, et surtout changer de regard sur les réponses à apporter…
Ces deux webinaires s’inscrivent dans le contexte de crise aiguë que nous traversons, et au moment où sont définies de nouvelles orientations politiques pour lutter contre la précarité alimentaire. Il s’agira de mettre en avant une approche systémique de l’accès à l’alimentation, qui envisage la précarité alimentaire comme une problématique multidimensionnelle traversée par différents enjeux : agricole, démocratique, écologique, de santé, de travail social… Et qui doit se penser en regard du droit à l’alimentation, un droit de l’Homme reconnu par le droit international, “qui protège le droit de chaque être humain à se nourrir dans la dignité, que ce soit en produisant lui-même son alimentation ou en l’achetant”.
En mettant en lumière des formes de solidarités qui s’inscrivent dans cette perspective, et en donnant la parole aux acteurs qui portent les mutations actuelles – acteurs de terrain engagés, chercheurs et acteurs institutionnels – nous souhaitons créer un espace permettant de trouver de l’inspiration et des outils, et de susciter des projets porteurs de transformation à différentes échelles.
Leclerc propose un panier alimentaire équilibré à 21€/semaine pour les personnes à petits budgets : réactivité et mise en œuvre concrète. Doit-on y voir une alternative crédible à un système d’aide alimentaire dépassé et aux atermoiements stériles de l’État en termes de lutte contre la précarité alimentaire ? Contrairement à l’aide alimentaire, l’offre promotionnelle de Leclerc est immédiatement accessible à tous, sans exigence administrative particulière, et en proximité. Cela semble bien être une réponse plus visible et plus lisible que celle des pouvoirs publics qui se résume à déléguer le problème de la précarité alimentaire au secteur caritatif à coups de subventions. Seuls petits détails : le colis est pré-pensé, les produits sont tous emballés, fruits et légumes compris.
Un peu plus de la moitié de la population mondiale est concentrée dans des espaces urbains. Deux tiers devraient l’être en 2050. Les villes, où peu d’aliments sont produits, concentrent et exacerbent les problèmes de durabilité de l’alimentation. Mais les innovations pour des systèmes alimentaires plus durables y fleurissent. Cependant, ces solutions potentielles font face à des défis de taille. En raison de la concentration des besoins dans les villes, les innovations qui se donnent pour objectif de contribuer à une transition vers plus de durabilité ne peuvent pas ignorer la question de leur changement d’échelle.
Nous proposons de penser cet enjeu à partir de la notion d’inclusion sociale. Qu’entend-on par « inclusion sociale » et quelles formes celleci peut-elle prendre ? Comment les objectifs d’inclusion sociale s’articulent-ils avec les stratégies de changement d’échelle ? Pour répondre à ces questions, nous nous appuierons sur deux exemples d’innovations étudiés dans le projet URBAL : le supermarché coopératif La Cagette et le programme municipal d’amélioration de la restauration scolaire « Ma cantine autrement » (MCA), tous deux à Montpellier.
Pour le changement d’échelle, deux voies sont possibles : l’élargissement par les innovations de leur publics originels ou des alliances entre innovations au sein d’un territoire, le soutien des pouvoirs publics étant dans tous les cas fondamental.
Entre juillet et novembre 2017, une consultation publique a été menée en France sur la thématique de l’alimentation : les États généraux de l’alimentation (EGA). Parmi les dix grandes questions abordées, l’une portait sur la précarité alimentaire. Les débats se sont déroulés au moyen de deux mécanismes : d’une part, via un atelier regroupant soixante acteurs (ONG, élus, acteurs économiques, opérateurs publics, partenaires sociaux et experts), et, d’autre part, via une consultation citoyenne par Internet portant sur « Comment favoriser l’accès du plus grand nombre à une alimentation suffisante et saine ? ». L’atelier (n° 12) était intitulé « Lutter contre l’insécurité alimentaire, s’assurer que chacun puisse avoir accès à une alimentation suffisante et de qualité en France et dans le monde ». Il s’est réuni quatre fois, dont une séance uniquement consacrée à l’insécurité alimentaire dans le monde. Cet article contextualise les débats de l’atelier 12 auquel les auteurs ont participé et propose une analyse des échanges et des perspectives qu’il a créées.
Voici les points-clés de ce texte :
● En France, la solidarité alimentaire continue de prendre la forme dominante de l’aide alimentaire.
● La précarité alimentaire reste traitée par l’assistance et non par l’ambition d’émancipation.
● Les débats au cours des États généraux de l’alimentation ont soulevé les questions de la dignité dans le traitement de la précarité alimentaire et révélé le décalage croissant entre les populations ciblées par les dispositifs d’aide alimentaire et celles qui en ont besoin.
Cette réflexion a pris naissance en 2013, dans les échanges entre deux personnes dont l’une est issue du monde agricole et l’autre de la recherche. L’un comme l’autre, nous constations l’enfermement des personnes recevant de l’aide alimentaire, dans une grande difficulté à s’émanciper des dispositifs de distribution et ce, malgré les discours et les pratiques portés par des professionnels ou des bénévoles bienveillants.
En s’appuyant sur la conception développée par Tim Lang de la démocratie alimentaire, nous ne pouvions que nous rendre compte que l’accès à l’alimentation « libre » d’une part et à une alimentation produite plus sainement d’autre part, était d’une inégalité flagrante. (…)En approfondissant notre réflexion, il nous a semblé que tant que l’accès ne serait pas consolidé conformément aux valeurs républicaines, à savoir un accès égalitaire, solidaire et libre, les injustices demeureraient quant aux conséquences sociales et sanitaires.
Pour les familles et personnes à petits budgets, l’aide alimentaire reste une réponse importante. Une partie des 5,5 millions de personnes ayant recours à l’aide alimentaire demeure captive de cette façon d’accéder à l’alimentation. Au milieu des années 1990, une nouvelle offre dans l’aide alimentaire s’est mise en place à partir des épiceries sociales. À côté de la traditionnelle distribution du colis, elles amènent un autre discours : ces familles et personnes conservent leur statut de citoyen parce qu’elles achètent leurs produits alimentaires. Le statut de citoyen est alors accolé à celui de consommateur.
En France, la profession agricole, absolument silencieuse sur l’alimentation populaire, va revendiquer l’aide alimentaire comme une activité agricole et en 2010, la loi d’avenir pour l’agriculture inscrit celle-ci dans le Code rural. Au final, cela rend visible le rôle de l’aide alimentaire comme filière assignée à gérer les surplus d’une agriculture productiviste.
Aucune de ces lois ne vient remettre en question la provenance de ce surplus, et encore moins suggérer un mode de production plus économe des ressources des humains et de la planète.
Dans cet article, l’autrice questionne la notion de « démocratie alimentaire », entendue comme « un terreau particulièrement propice à la construction d’une nouvelle citoyenneté, dans laquelle les citoyens retrouvent les moyens d’orienter l’évolution de leur système alimentaire à travers leurs décisions et pas uniquement leurs actes d’achat. »
La reconnaissance effective du droit à l’alimentation est nécessaire pour que puisse ainsi se décliner des actions collectives du côté de la demande sociale mais (et surtout) faire bouger l’offre alimentaire. En outre, la France ne reconnait un droit qu’à travers la loi qui le promulgue : aujourd’hui, il n’existe pas de droit à l’alimentation.
Le droit à l’alimentation fait partie des droits humains reconnus par le droit international. Il permet la protection de l’accès à l’alimentation pour tous, soit en la produisant soi-même, soit en l’achetant.
En 2016, le Comité a demandé à la France d’« indiquer les mesures prises pour garantir de manière effective la reconnaissance du droit à l’alimentation dans la législation et sa jouissance dans la pratique ». La France a répondu en indiquant et détaillant la façon dont est financée l’aide alimentaire entre les crédits européens et français. Cette réponse est révélatrice de la conception française qui confond aide alimentaire et droit à l’alimentation : l’assistance à être nourri d’une part et l’accès autonome à l’alimentation d’autre part.
Cet article retrace les enjeux de l’accès à l’alimentation pour les personnes en situation de précarité au regard des mesures prises en France durant la crise du Covid-19.
Après avoir abordé les contraintes de l’accès à l’alimentation pour les ménages à faibles revenus et avoir analysé l’adaptation (ou non) de l’aide alimentaire, l’autrice tente de tirer des leçons de cette crise du covid19 afin de reproduire ce qui a porté ses fruits, mais surtout de ne pas répéter les mêmes erreurs à l’avenir.
L’objectif de cette enquête est d’identifier la diversité des situations de précarisation alimentaire liées à la crise du Covid-19 et les difficultés rencontrées par les structures de solidarité.